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L’élan et le désir

Pour Martine Toda, Inês J.-S.***[1] et Marie-Pierre Bonniol

En souvenir de Jean-Pierre Lacroux,
qui a aimé certains de ces travaux.

« Nous ne sommes coupables de rien. Sauf d’être attirés
par nos semblables : les handicapés de l’amour ; ceux qui
se sentent indignes d’en recevoir, ceux qui ne s’aiment pas, ceux
qui cherchent à se remplir de ce vide qu’ils sentent en eux. »

A
IGUEMARINE, Lettre à Arthur B., le 3 juin 2002.


Prologue

Témoins de mon évolution esthétique et technique, les trois travaux que je présente ici sont d’abord des actes d’amour. Il s’agit d’un extrait de lettre, d’une lettre entière et d’un texte personnel, qui m’ont été successivement adressés par des femmes que j’aimais et qui m’ont aimé. Je m’en suis alors saisi et les ai mis en pages, souhaitant leur faire don en retour de la seule chose que je sais vraiment accomplir : de la typographie. Par ce geste je me donnais à elles, tout entier.

Je ne dirai pas ici quel jugement aujourd’hui je porte sur ces pièces parfois anciennes : il n’a guère d’importance. Je ne raconterai pas non plus les circonstances qui ont présidé à leur création (elles ne regardent personne). Je n’évoquerai pas plus, comme je le fais ailleurs sur ce site, les choix typographiques que j’ai opérés, ni la patience et la joie du travail qui s’accomplit : ces détails n’ont pas leur place ici.

Envoi

Si tout le monde peut parcourir cette page Web, elle ne s’adresse en réalité qu’à ces trois femmes. Mais le lecteur attentif aura déjà compris que la typographie, pour moi, c’est d’abord une affaire d’amour, d’élan et de désir : il y a des textes que j’ai caressés en les composant, exactement comme on caresse le corps d’une femme aimée.



Martine

Vous avez été ma joie, mon bonheur et ma raison de vivre. Mais je n’ai pas vraiment su vous dire combien mon amour pour vous était intense, unique, bouleversant, inconnu jusqu’alors : jamais je n’en ai eu de pareil, jamais je n’en connaîtrai d’aussi fort. Je n’ai pas su vous dire non plus que vous rencontrer a modifié mon existence et enchanté ma vie. Elle l’enchante pour toujours : vous me manquez infiniment depuis votre départ. Chaque jour je pense à vous, chaque jour je me souviens de votre immense amour pour moi, de votre rire, de vos yeux mobiles et aux aguets, je me souviens de votre troublante beauté, de vos mots étranges et malicieux, je me souviens du quotidien partagé, je me souviens du bonheur, je me souviens que vous m’attiriez et me déconcertiez à la fois. Je me souviens de vous. Comment vous redire mon amour et ma joie ? Sachez, ma Yukiko, ma Princesse de bambou… Sachez, ma si jolie trouvée d’au-delà de ce monde… Sachez, mon aimée, mon inoubliable, mon irremplaçable… Sachez que vous êtes mon plus bel et mon plus grand amour. Sachez que je vous aime encore.

Mai-juin 2002


Février 1999.
Composition en Blur, format : 15 cm × 15 cm.
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Inês

Notre amour fut celui des âmes de deux enfants perdus qui enfin se retrouvent, puis brutalement se déchirent et se quittent, broyés par le chagrin. Je me souviens : lorsque je t’ai vue pour la première fois, mes mains se sont mises à trembler d’émotion et de bonheur, et j’ai voulu revoir cette femme qui avait fait trembler mes mains… Tu es belle, ma désirée, et d’une richesse et d’une profondeur d’âme comme il y en a peu. Je me souviens des jours passés, du bonheur d’être ensemble, je me souviens de l’avenir que nous rêvions à deux ; je suis fier d’avoir été aimé de toi et heureux de t’avoir aimée : un amour indestructible. Mon Inês, toi que j’ai tant chérie et qui m’as tant aimé, toi qui m’as su comme personne encore jamais ne l’avait fait : tu m’as rendu à la vie et au plaisir, tu m’as rendu au monde. Sache que je ne t’ai jamais oubliée, sache que souvent je pense à toi. Sache que je t’aime encore.

Mai-juin 2002


Septembre 2001.
Composition en Goudy Modern, format : 16,5 cm × 25 cm.
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Marie-Pierre

PopGirl (PomPom Girl), je t’ai aimée si fort que j’ai fait fi de la face obscure que tu caches sous tes paupières. Je me rappelle le jour où je t’ai dit : « Je t’attendais depuis très longtemps… » Alors, il y a eu plein de soleil dans tes si jolis yeux (le malheur en toi en a été un moment aveuglé) et nous nous sommes embrassés. Longuement, sans pouvoir nous arrêter, comme des noyés cherchant leur oxygène. Mais trop vite, la peur t’a de nouveau mordu la nuque, et avec elle le goût de la trahison : la lâcheté et le mensonge, l’urgence de la fuite. Je voudrais pouvoir ne pas m’en souvenir, pouvoir effacer les temps de destruction ; seuls devraient demeurer ton souffle dans mes cheveux pour me dire ton amour, et ce murmure d’un soir : « Je t’aime, je te prends. » Sache, Marie-Pierre, que je crois que quelque chose de lumineux a réellement éclos en toi ce soir-là, et m’a « pris », à jamais.

Mai-juin/octobre 2002


Mars 2002.
Composition en Knockout, format : 39,6 cm × 31,5 cm.
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[1] C’est à la demande d’Inês J.-S.*** que son nom de famille a été supprimé.


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